Les autorités turques ont libéré, lundi, l’ancien commandant militaire syrien Abdul Maeen Mohammad Kahhal, connu sous le nom de guerre « Abu Al-Abed Ashda’a », après près de deux ans de détention sur le territoire turc, une décision qui a suscité un grand intérêt dans les cercles concernés par la question syrienne.
Sa libération est intervenue sans aucun communiqué officiel des autorités turques, tandis que des activistes et des proches ont diffusé des photos récentes de lui, dans un contexte de silence sur les circonstances de sa détention ou les raisons de cette décision.
Détention mystérieuse
Kahhal a été arrêté le 13 juin 2023 alors qu’il tentait d’entrer en Turquie par le poste frontière d’Al-Hamam, avec l’intention d’accomplir le pèlerinage du Hajj. Selon des sources bien informées, il a été arrêté au point de « prise d’empreintes digitales » avec sa mère, qui a pu poursuivre son chemin sans encombre.
Aucune autorité officielle n’a expliqué les raisons de son arrestation à l’époque, et aucune charge formelle ne lui a été adressée durant sa détention, ce qui a suscité des interrogations, avec des avis partagés entre ceux qui y voyaient une mesure de précaution sécuritaire et d’autres y voyant un signe d’un changement dans la politique turque envers les figures armées de l’opposition syrienne.
D’Ahrar al-Sham à Hay’at Tahrir al-Sham
« Abu Al-Abed Ashda’a » est originaire d’Alep et s’est fait connaître militairement durant les années de guerre, d’abord au sein d’Ahrar al-Sham, puis en rejoignant Hay’at Tahrir al-Sham (HTS) fin 2016, se séparant d’Ahrar al-Sham avec plus de 100 combattants de sa formation connue sous le nom de « Mujahideen Ashda’a ».
Au sein de HTS, il a occupé plusieurs postes importants, notamment la direction du bloc militaire à Alep, puis la commande de « l’armée Omar Ibn al-Khattab », considérée comme l’une des principales formations spéciales du groupe.
Départ du groupe et position
En septembre 2019, Abu Al-Abed a été arrêté par HTS lui-même après avoir publié une vidéo intitulée « Pour que le navire ne coule pas », dans laquelle il parlait franchement de ce qu’il qualifiait de « corruption administrative et financière » au sein du groupe, critiquant sévèrement ses dirigeants. Cela a conduit à sa détention pendant environ quatre mois, avant sa libération.
Sa démission de HTS a marqué une rupture définitive, puisqu’il n’a plus eu d’activité organisationnelle connue au sein du groupe après 2020, devenant ouvertement opposé à celui-ci, apparaissant fréquemment dans des vidéos critiquant les dérives et écarts observés chez les dirigeants du groupe après leur prise de contrôle de vastes zones dans le nord de la Syrie.
Absence puis retour
Après sa libération en Turquie, des proches ont indiqué qu’il avait été libéré sans procès pendant sa détention, et qu’aucune accusation officielle ne lui avait été retenue, selon les plateformes sympathisantes.
Des sources locales ont confirmé qu’après sa libération, il s’est rendu dans la région de Jindires, au nord d’Alep, où se trouve le passage frontalier d’Al-Hamam par lequel il était entré, ce qui renforce les attentes d’un retour dans les zones libérées du nord de la Syrie.
Réactions populaires et questions politiques
Durant sa détention, plusieurs activistes et proches ont appelé à sa libération, estimant que sa détention sans procès était « injustifiée ». Certains ont lié son cas à des changements régionaux, suggérant que son arrestation faisait peut-être partie d’accords plus larges ou d’une politique de réajustement des influences dans le nord de la Syrie.
Cependant, aucune autorité turque ou syrienne officielle n’a publié de clarifications sur les raisons ou les procédures engagées à son encontre, laissant la question ouverte à plusieurs hypothèses.
Avenir incertain
Les perspectives pour Abu Al-Abed Ashda’a restent floues, tant en ce qui concerne ses mouvements que ses orientations. Il n’a fait aucune déclaration publique depuis sa libération, et on ignore s’il retournera à une activité militaire ou politique ou choisira de s’engager dans la vie civile.
Malgré une présence de terrain réduite ces dernières années, son cas suscite toujours un grand intérêt, car il est l’une des figures majeures qui a navigué entre plusieurs formations et dont le nom a été lié à plusieurs tentatives de réforme interne et critiques franches des structures militaires et factionnelles dans le nord de la Syrie.